Il avait dit à (la victime, ndlr) +ta vie sera courte. Je vais faire un truc qui va me faire aller en prison+. C’est peut-être la seule de ces prophéties qui s’est révélée vraie », a affirmé un des enquêteurs lundi à la barre de la cour d’assises du Val-de-Marne.
Le 17 août 2006 au matin, Nanou Kapinga avait été trouvée morte dans une ruelle de Chennevières-sur-Marne (Val-de-Marne), atteinte dans le dos « à bout touchant » par un tir de fusil, alors qu’elle se rendait à son travail. Dans ses bras, un dossier médical attestait d’un récent avortement.
Très tôt, les soupçons se portent sur celui qui se fait surnommer « le prophète ». Aujourd’hui âgé de 36 ans, Odilon Nseka est alors connu pour les prières qu’il organise dans une cité de Champigny-sur-Marne et pour sa liaison avec la victime, une de ses fidèles, issue comme lui de la communauté de République Démocratique du Congo (RDC).
Selon l’accusation, il n’aurait pas supporté que la jeune femme ait décidé de rompre et l’aurait harcelée pendant des mois avant de passer à l’acte.
D’abord mis hors de cause avant d’être interpellé en 2008 en Belgique, M. Nseka, mise soignée et silhouette râblée, a toujours nié les faits, récusant tout différend avec la victime. L’arme du crime n’a par ailleurs jamais été retrouvée.
« Je sens que vous êtes à l’écoute et qu’on pourra comprendre là où il y a la vérité et là où se cache le mensonge », a-t-il espéré lundi, devant la cour.
« Diplômé en théologie » Né à Kinshasa en RDC, lui-même se présente comme un membre de « l’Eglise du Christ du Zaïre » et affirme avoir mené plusieurs missions évangélistes au Nigeria et au Bénin avant d’entrer irrégulièrement en France en 2003.
Son curriculum laisse toutefois la cour sceptique.
« Quand on est missionnaire, l’Eglise organise le séjour régulier de ses pasteurs à l’étranger. Votre église, et je dis église avec des guillemets, n’a donc pas d’existence officielle? », l’interroge le président.
L’accusé hésite, se dit successivement pentecôtiste et évangéliste mais n’en démord pas: « Je suis diplômé en théologie et c’est facile à prouver », dit-il.
« Au fond cette question est secondaire. Tout le monde dit qu’il était prêtre et ça ne fait de toute façon pas de lui un tueur », commente hors de la salle d’audience un de ses deux avocats belges, Me Amrani, assurant qu’aucun élément matériel n’incrimine son client.
Pour un homme présent dans le public, la question n’a rien d’anodin. Le père de la victime, Jean-Robert Kapinga, ne voit dans l’accusé qu’un « rigolo », « un escroc ». « On en voit plein des gens comme lui dans les cités. Ils savent comment s’intégrer dans les milieux africains pour profiter des gens », explique-t-il à l’AFP.
Selon l’acte d’accusation, M. Nseka percevait auprès de ses fidèles une « dîme » correspondant à 10% de leurs revenus. Prostrée dans son chagrin, la propre mère de la victime lui versait ainsi 120 euros par mois.
« Il s’agit de gens très croyants et les prêtres ont beaucoup d’influence auprès d’eux. Ils passent dans les familles qui sont flattées qu’un pasteur vienne faire le culte chez eux », a souligné à la barre un autre responsable de l’enquête.
Verdict attendu vendredi.
Source : http://www.liberation.fr/depeches/01012385256-un-pretre-evangeliste-prophete-auto-proclame-juge-pour-le-meurtre-d-une-fidele
CRETEIL (AFP) -« © 2012 AFP