Dimanche 29 septembre 2013, à la fin du grand culte de « Protestants en fête » célébré au Palais omnisports Paris-Bercy, le pasteur Claude Baty passera solennellement le relais à François Clavairoly. Ce dernier, qui prononcera des paroles d’envoi et donnera la bénédiction finale, prendra ses fonctions dès mardi comme nouveau président de la Fédération protestante de France, affichant une certaine continuité malgré l’alternance que représente le choix d’un pasteur réformé après six années de « présidence évangélique ».
Depuis 2007, Claude Baty était en effet le second évangélique à présider la FPF (1). C’est paradoxalement sous le mandat de ce pasteur de l’Union des Églises évangéliques libres (UEEL) qu’a été créé le Conseil national des évangéliques de France (Cnef), avec pour objectif de représenter, lui aussi, l’évangélisme français… Mais cet homme de consensus, pondéré et pragmatique, a su tout à la fois désamorcer les tensions suscitées par l’apparition de cette nouvelle instance concurrente et rassurer une fédération composée aux deux tiers par lesprotestants luthéro-réformés.
CLAUDE BATY N’A EU DE CESSE ÉGALEMENT DE PLAIDER LA CAUSE DES GENS DU VOYAGE
Attentif à la recomposition du protestantisme, il a été à l’origine du colloque de 2010 sur cette « famille recomposée ». Pudique mais sans froideur, cet ancien missionnaire au Congo, puis en Suède, a eu à cœur de développer les collaborations entre les Églises et les œuvres protestantes, ainsi qu’avec les fédérations d’Églises de la francophonie, notamment en Haïti, au Congo Brazzaville et en République démocratique du Congo où résident le plus grand nombre de protestants francophones.
Durant sa présidence, il n’a eu de cesse également de plaider la cause des gens du voyage – « Mon vœu, c’est que nous soyons toujours récalcitrants s’il venait à l’idée des autorités d’imposer une politique qui considère les êtres humains comme des objets », affirmait-il à l’Assemblée du Désert en 2012 – et celle des évangéliques qui peinent à accéder à des lieux de culte dignes de ce nom. Soucieux d’une laïcité qui ne verse pas dans le « laïcisme » et qui accorde toute leur place aux religions dans l’espace public, il a contribué à la création de la Conférence des responsables de culte en France en 2010. À bientôt 66 ans, ce père de deux enfants et grand-père n’a pas souhaité aller au bout de son second mandat et va s’installer dans les Cévennes, dont son épouse est originaire.
FRANÇOIS CLAVAIROLY, MARQUÉ PAR LE PROTESTANTISME LIBÉRAL, DEVRA RASSURER LES ÉVANGÉLIQUES
C’est de ce haut lieu protestant qu’est, lui aussi, issu François Clavairoly,élu en janvier pour succéder au pasteur Baty. Fils, petit-fils et père de pasteur, cet homme de 55 ans est emblématique du protestantisme réformé français. Attaché à la prédication (2), auteur de plusieurs livres sur l’actualité de Luther et Calvin, il s’est d’ailleurs déjà lancé dans la préparation du Jubilé de la Réforme, en 2017, auquel il espère associer les partenaires catholiques. Il est sensible à l’œcuménisme – il est membre du groupe des Dombes – mais également au dialogue interreligieux. Vice-président de l’Amitié judéo-chrétienne, il a d’ailleurs assuré les relations avec le judaïsme de la FPF.
Homme de consensus comme son prédécesseur, artisan de la création de l’Église protestante unie de France (Epuf), en mai, François Clavairoly entend poursuivre, au sein de la fédération, cet engagement en faveur de l’unité du protestantisme. Il apporte avec lui un sens de l’écoute et une expérience pastorale de trente années : à Rouen, à Lille, puis comme président du conseil régional de l’Église réformée en Nord-Normandie, et enfin à Paris, depuis 2001, comme pasteur de la paroisse du Saint-Esprit.
Mais il faudra aussi à ce théologien marqué par le protestantisme libéral rassurer les évangéliques qui envisagent de rejoindre la FPF, alors que plusieurs questions éthiques décisives sont en débat : la lutte contre la pauvreté et l’accueil des immigrés, mais aussi la réflexion sur la fin de vie et celle sur la bénédiction des couples de même sexe, déjà entamée au sein de l’Epuf.
Source : http://www.la-croix.com/Religion/Spiritualite/Le-choix-de-l-alternance-2013-09-27-1027057
27/9/13
par CÉLINE HOYEAU
(1) Après Édouard Grüner, de 1907 à 1927.
(2) Bible or not Bible, Pourquoi lire la Bible ? François Clavairoly et Alain Joly, Onésime 2000, à paraître en octobre 2013.