La vie de l’Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) du Périgord noir, qui accompagne 400 enfants, adolescents et adultes en situation de handicap dès l’âge de 3 ans, n’est finalement pas un long fleuve tranquille ces derniers temps. Les événements se suivent, heureux et malheureux. Il y a quelques semaines, une fête était organisée pour l’inauguration du tout nouveau pôle enfance à côté du siège, rue Jean-Leclaire à Sarlat (24).
Jeudi matin, dans ce même pôle enfance, une affaire de maltraitance mettait une partie du personnel dans la rue. Ils étaient donc une quarantaine sur les 170 que compte l’association, issus du pôle enfance et du pôle adultes, banderoles et parapluies en main pour montrer leur solidarité avec un collègue éducateur de l’institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep). Cette structure reçoit en semi-internat des enfants de 4 à 12 ans présentant des difficultés psychologiques. Les salariés étaient dans la rue à crier leur désaccord avec la direction tandis que cette dernière recevait en entretien l’éducateur incriminé et la représentante du personnel et délégué CGT, Ghislaine Haro.
« Elle se jette par terre »
« Il s’agit d’une procédure liée à un signalement pour suspicion de maltraitance, relativise le directeur général de la structure, Éric Jaubertie. Il y a suspicion. Il n’est accusé de rien. Dans ce cas-là, nous sommes obligés de vérifier ». Il était donc question, dans cette procédure, d’entendre l’éducateur qui fait l’objet d’une mise à pied conservatoire depuis une semaine pour des faits qui se seraient déroulés les 16 et 21 janvier au réfectoire de l’établissement. Une enfant de 7 ans est concernée, jugée « en grande difficulté psychologique » par des personnels en contact avec elle. Elle est entrée à l’Itep en septembre 2013.
« Nous sommes tous en difficultés avec elle, affirme Ghislaine Haro. Elle se jette par terre. Mardi soir, elle n’a pas pu prendre le transport à cause de ça et sa famille d’accueil a dû venir la chercher. Quand les enfants sont agacés, nous sommes obligés de les contenir. Il faut être ferme pour ne pas qu’ils se fassent mal ».
L’éducateur a donné sa version des faits à la direction, expliquant qu’une première fois, l’enfant s’était jetée au sol alors qu’il voulait la contenir et qu’elle s’était blessée au front toute seule, et qu’une deuxième fois, elle avait voulu lui donner un coup de pied qu’il avait évité et qu’ils avaient perdu l’équilibre tous le deux. Il lui aurait alors marché sur la jambe et « fait une marque ».
« Je le vis de manière assez compliquée », explique l’éducateur qui se pose des questions sur son avenir au sein de l’établissement, qu’il a rejoint il y a cinq ans. À ce jour, au pire, il risque un licenciement par son employeur, l’APAJH. Le président devrait rendre une décision dans un délai maximum d’un mois.
« Buzz de la CGT »
Deux délégués de l’Agence régionale de santé (ARS) étaient présents, hier, à Sarlat, pour mener leurs investigations. À ce niveau de la procédure, il n’y aurait aucune plainte, ni de l’établissement, ni de l’autorité parentale, ni des instances compétentes.
La mobilisation d’hier n’a pas ébranlé le directeur : « On ne va pas céder à la rue », lâche-t-il en qualifiant ce débrayage de « buzz de la CGT ». Buzz ou pas, les salariés mobilisés promettent un nouveau mouvement « quelle que soit l’issue de la procédure ». Ils souhaitent, par ce biais, « témoigner de l’ambiance délétère qui règne entre certains personnels et la direction ».
« Cela me fait chaud au cœur, c’est symboliquement très fort de voir cette mobilisation de mes collègues, ce soutien, cette solidarité, ces SMS d’encouragement », confie l’éducateur. Celui-ci fait par ailleurs le lien entre ses déboires du moment et ses agissements de septembre : à l’époque, il s’était plaint de la suppression de temps éducatif pour les enfants. Il avait alors mis des Post-it sur les fenêtres « pour [se] faire entendre ». Il avait écopé d’une observation.
source : SUD OUEST 31 janvier 2014