Le chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital de Garches est la caution scientifique du documentaire « Hold-up » et un adepte des « théories alternatives ».
Caution scientifique conspirationniste
« Il y a un homme qui connaît bien les mesures à prendre en cas d’épidémie. Pendant vingt ans, il a géré ces situations de crise. » Cet homme auquel le narrateur du documentaire Hold-up tresse ainsi des lauriers, c’est Christian Perronne. Le chef de service des maladies infectieuses à l’hôpital de Garches (Hauts-de-Seine) est l’un des personnages principaux de ce film sorti le 11 novembre qui prétend dénoncer les « manipulations » cachées de l’épidémie de Covid-19.
Le visage grave, l’infectiologue y tient son rôle, celui de l’initié qui ose dénoncer les dérives du système. Les coupables sont, selon lui, à chercher du côté de l’industrie pharmaceutique, « première source de corruption », et de leurs complices, des pseudo-soignants aveuglés par leurs conflits d’intérêts.
Pamphlétaire à succès
Dès le mois de juin, il signait Y a-t-il une erreur qu’ils n’ont pas commise ? (Albin Michel). Un réquisitoire en règle contre la gestion de la pandémie, qui lui a valu de nombreux passages sur les plateaux de télévision. Du gouvernement au conseil scientifique sur le Covid-19, pas un responsable scientifique ou politique n’échappe au jeu de massacre. À l’exception du directeur de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille Didier Raoult, avec qui Christian Perronne partage l’inébranlable conviction que l’hydroxychloroquine est la panacée. Et ça marche : tiré au départ à 8 000 exemplaires, l’essai de l’infectiologue a été réimprimé pour atteindre un total de 103 000 copies.
Adepte des « théories alternatives »
Bien avant la pandémie due au SARS-CoV-2, il s’est illustré par ses prises de position non conventionnelles au sujet de la maladie de Lyme. Selon lui, on constate depuis des années une explosion de cette infection à cause d’une prolifération de tiques modifiées par un chercheur en virologie nazi réfugié aux Etats-Unis. « L’armée américaine et les scientifiques sous sa coupe ont [donc] tout intérêt à cacher l’épidémie », assure-t-il au Journal du dimanche en 2016. Une croisade qui lui a attiré les moqueries de Didier Raoult, ce dernier dépeignant, dans une chronique pour Le Point également en 2016, Perronne en « confrère qui a pris une position de leader du Lyme, sans bagage scientifique spécifique dans ce domaine » et a « embrassé les théories alternatives ».
Expert multicarte
S’il rivalise de sarcasmes au sujet des « comités scientifiques coupés des réalités du terrain », Christian Perronne a lui-même un CV bien garni de telles expériences. Il a présidé jusqu’en 2016 la Commission maladies transmissibles du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) et eu des responsabilités dans des groupes de travail à l’agence du médicament (ANSM) et à l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Peut-on avoir un pied dedans, un pied dehors ? Une partie de ses pairs n’a en tout cas pas apprécié ses mises en cause du monde médical depuis le printemps. L’ordre des médecins, qui a été saisi au sujet de ses déclarations polémiques sur l’épidémie, doit examiner son dossier d’ici à la fin de l’année.
source :
Le Monde
le 18 novembre 2020
Par Adrien Sénécat