A l’Assemblée nationale, après une Marseillaise chantée à l’unisson, une première depuis la victoire contre l’Allemagne en 1918, le Premier ministre a prononcé un discours sur les réponses à apporter aux tueries de la semaine dernière, qui ont fait 17 morts à Paris et dans sa proche banlieue.
Il a souligné que les autorités devaient être « à la hauteur de l’attente, de l’exigence, du message des Français » qui se sont mobilisés par millions dimanche 11 janvier contre « la barbarie ».
« Oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical », a-t-il dit devant un hémicycle qui, à droite comme à gauche, l’a applaudi.
Manuel Valls a insisté sur la persistance de « risques sérieux et très élevés » en France, « ceux liés à d’éventuels complices, ou encore ceux émanant de réseaux, de donneurs d’ordre du terrorisme international, de cyberattaques ».
Il s’est engagé à un renforcement « exceptionnel » des mesures de renseignement et de surveillance de la mouvance djihadiste à l’étranger et en France — réseaux ou « loups solitaires » –, sans précipitation. Mais le Premier ministre a surtout prôné un examen de conscience de la classe politique et des représentants du culte musulman sur les « les échecs de l’intégration » et les dérives islamistes, les agresseurs de Charlie Hebdo et d’une supérette juive ayant revendiqué leurs liens avec la mouvance djihadiste.
« Je ne veux plus que dans notre pays il y ait des juifs qui puissent avoir peur et je ne veux pas qu’il y ait des musulmans qui aient honte », a-t-il lancé devant les députés.
« L’islam est la deuxième religion de France, elle a toute sa place en France, et notre défi, pas en France, mais dans le monde, c’est de faire cette démonstration : la République, la laïcité, l’égalité hommes-femmes sont compatibles avec toutes les religions sur le sol national qui acceptent les principes et les valeurs de la République », a-t-il dit.
{{« CHAPE DE PLOMB »}}
Manuel Valls a exhorté à la plus grande intransigeance face à « ceux qui tentent, au nom de l’islam, d’imposer une chape de plomb sur des quartiers, de faire régner leur ordre sur fond de trafics et sur fond de radicalisme religieux ».
« Quand de vrais ghettos urbains se forment, où l’on n’est plus qu’entre soi, où l’on ne prône que le repli, que la mise en congé de la société, où l’Etat n’est plus présent, comment aller vers la République, saisir cette main fraternelle qu’elle tend ? », a-t-il dit dans un discours plusieurs fois applaudi.
Ce débat, a poursuivi Manuel Valls, « n’est pas entre l’islam et la société ». « C’est bien un débat que l’islam de France doit mener en son sein ».
Pour le Premier ministre, qui marque une rupture avec l' »angélisme » reproché à la gauche face aux enjeux sécuritaires, « la réponse aux urgences de notre société doit être forte, sans hésitation : La République et ses valeurs. Et en premier lieu la laïcité, qui est gage d’unité et de tolérance ».
L’exécutif, a-t-il promis notamment à l’adresse des bancs de la droite, répondra aux menaces avec « lucidité », mais sans céder « à la précipitation » et « aux postures faciles et stériles ».
« La France n’est pas en guerre contre une religion. (…) La France est en guerre contre le terrorisme, contre les djihadistes, contre le radicalisme », a-t-il souligné.
Son discours a été salué, y compris à droite.
« Jamais dans l’histoire récente de l’hémicycle nous n’avions entendu des propos aussi puissants, aussi adaptés à la situation et la réaction de l’Assemblée unie a été le symbole de ce moment d’intensité républicaine », a dit Yves Jego, député UDI. « Il faut remercier le Premier ministre, il a eu le courage d’incarner les valeurs républicaines, universelles et partagées par l’ensemble des groupes politiques. »
Pour Christian Jacob, le président du groupe UMP, « les intentions du Premier ministre sont tout à fait louables et nous les reconnaissons comme telles ».
« Maintenant, attendons le passage aux actes. »
source : fr.reuters.com
par Sophie Louet, avec Emile Picy, édité par Yves Clarisse)