Suivie par près de cinq millions de personnes sur TikTok, l’influenceuse Ophénya est dans le viseur de la justice pour des suspicions de dérives sectaires. Un collectif lance l’alerte et appelle à un meilleur encadrement de l’activité en ligne des influenceurs.
L’influenceuse Ophénya est soupçonnée de mettre en danger la santé mentale de sa communauté : elle est visée par un signalement de la Miviludes, l’organisme chargé d’enquêter sur les dérives sectaires. Ophélie Vincent, de son vrai nom, cumule 784.000 abonnés sur Instagram et près de 5 millions sur TikTok. Elle partage son quotidien, donne des conseils sur la santé mentale et l’acceptation de soi : très populaire depuis quatre ans, Ophénya s’est fait connaître pour son engagement contre le harcèlement.
Son public : en grande majorité des adolescentes. Une communauté très engagée, avec laquelle la lyonnaise de 24 ans entretient une relation fusionnelle, ou plutot une relation malsaine, alerte le collectif MEER (Mineurs, éthique et réseaux). Depuis plus d’un an, ce collectif rassemble des extraits de live et des captures d’écran. « On lui reproche d’avoir un lien parasocial poussé à l’extrême avec sa communauté : on a documenté pendant un an des mineurs qui se mutilent, qui ont des propos suicidaires et qui taguent de façon systématique Ophénya dans leurs publications, parce que tout ça est public, c’est visible sur Instagram. Quand on arrive à documenter des jeunes filles qui, en moyenne, peuvent faire une publication toutes les six minutes à propos d’Ophénya et en la taguant, oui, on se questionne sur la nature du lien » estiment Margaux, c’est un pseudonyme, l’une des membres du collectif.
Ophénya n’hésite pas à passer plusieurs heures au téléphone avec des fans : le collectif a retrouvé des messages de l’influenceuse envoyés en pleine nuit. Elle est capable aussi de faire des lives à 3 heures du matin. Interrogé par le journal Le Monde, le directeur général adjoint de l’association e-Enfance est sur la même longueur d’onde : « Ophenya a des comportements qui peuvent se rapprocher de dérives sectaires » affirme Samuel Comblé. Le député socialiste Arthur Delaporte, auteur d’une loi sur les influenceurs, tient des propos similaires.
« Un mètre étalon » d’un phénomène plus global
Et son compte TikTok est banni depuis deux semaines : l’une des ses vidéos a « enfreint les règles communautaires » de la plateforme. Une de ses abonnées mineurs a participé à un live, ce qui est pourtant interdit par le réseau social. Ophénya de son côté dénonce une campagne de cyberharcèlement, et dit ne pas comprendre ces accusations, et assumer la relation qu’elle entretient avec ses fans, qui la soutiennnent contre vents et marées.
Le collectif MEER, qui surveille de très près l’activité d’Ophenya, ne veut pas en faire un cas particulier : il souhaite des mesures pour mieux encadrer les relations qu’entretiennent les influenceurs avec leurs communautés : « Ophénya, c’est un mètre-étalon, elle cumule beaucoup de thématiques, mais sur les réseaux, ce n’est pas la seule qu’on peut pointer du doigt pour des problématiques du même ordre« . Le collectif
préconise plusieurs mesures, comme une vérification plus efficace de l’âge des utilisateurs sur les réseaux sociaux, ou encore la création d’un « influscore », à l’image du Nutriscore sur les produits alimentaires, un baromètre qui permettrait d’évaluer l’éthique des influenceurs, et qui pourrait dissuader les marques de collaborer avec certains d’entre eux, dont les contenus ou le comportements est problématique.
source : FRANCE INTER