Pour Marthe, sans nouvelles depuis huit ans de ses deux filles, happées par des communautés religieuses, le couperet est tombé quand sa cadette l’a reniée. Sa mère l’aurait « conçue dans un cercueil », après la mort d’un enfant in utero.
Un soir de 2003, la fille de Marc a accusé tout à trac son père d’avoir commis l' »inceste » sur elle dans son enfance. Ce souvenir refoulé « lui est revenu sous forme d’une vision », via un « prêtre psychanalyste.
Le Livre noir parle de « charismes » (dons de l’Esprit-Saint), de guérisons psychiques, mais aussi physiques, de prédication, et de prophéties ».
Ruptures familiales, méthodes de soins charlatanesques, exigences financières, dérives sexuelles, conditions de vie destructives, le Collectif du CCMM (Centre contre les manipulations mentales), évoque aussi des suicides de personnes fragiles qui n’ont pas pu surmonter ces pseudo-thérapies.
« Il s’agit d’abus de faiblesse caractérisés », souligne Annie Guibert, présidente du CCMM. Ils ne touchent pas seulement les victimes de dérives sectaires, mais leurs familles toutes entières qui demandent réparation ».
Olivier Perru, des Frères des Ecoles Chrétiennes, dénonce une « soupe nauséabonde », servie par des « dérapeutes psycho-mystico-dingos » et qui présente « un danger potentiel d’illuminisme pour l’Eglise et pour la société ».
« Sans foi ni loi »
« Non seulement les sessions agapè sont condamnables par les autorités religieuses catholiques, mais on pourrait aussi y voir un exercice illégal de prétendues psychothérapies », avertit ce professeur à l’Université Lyon 1.
Il y a un an, alerté sur ces thérapies sauvages, – parmi lesquelles des exorcismes non encadrés – menées depuis des années au sein de différentes communautés religieuses, dont celle des Béatitudes, l’épiscopat français avait appelé au discernement.
Dans un document confidentiel que l’AFP s’est , Bertrand Guiouillier, psychiatre et psychanalyste, y condamnait cette « confusion de l’imaginaire et de la réalité ». « Fausse, réductrice et dangereuse, car figeant toute évolution ».
Malgré l’appel de l’Episcopat, note la Soeur dominicaine Marie-Ancilla, les « guérisons intérieures se déroulent sans foi ni loi dans une trentaine de centres, en France, y compris à l’ombre de monastères, comme au Puy-en-Velay, y compris avec l’aval du diocèse ».
Beaucoup, s’ils ne l’étaient pas au départ, sortent traumatisés de ces Agapè, si l’on en juge par le témoignage de ce jeune homme, « passé de la conviction d’avoir vécu une enfance heureuse à l’incapacité d’ouvrir l’album des photos de famille ».
Il détaille dans ce « Livre Noir » les six jours d’Agapè au Puy, où, étroitement encadrés, les retraitants font « remonter les mémoires corporelles et affectives du passé par l’action de l’Esprit Saint ».
Modelages de glaise à l’appui, pour mieux « intérioriser spirituellement l’émotion embryonnaire ressentie dans le ventre maternel », il y « découvrira » qu’il « a grandi trop vite » et que son père l’a fait souffrir.
S’en est suivi une dépression.
Source Le point .fr mise à jour 21H08