Parce qu’elle n’a pas de définition juridique, que les victimes se retournent rarement contre leurs croyances et qu’il est difficile de réunir les preuves d’un préjudice avéré, leurs auteurs se retrouvent rarement à la barre. Mais c’est parce que l’Unadvi (Union nationale de défense des familles et de l’individu victime de sectes) est convaincue de se retrouver devant une dérive sectaire manifeste qu’elle s’est portée partie civile dans le procès qui doit être jugé aujourd’hui au tribunal correctionnel de Montpellier.
L’accusé, Claude Sabbah, n’est pas un gourou à proprement parler. Ancien médecin généraliste (il s’est lui-même fait baptisée « biopsychogénéalogie », cette méthode, basée sur les croyances du médecin allemand Ryke Dirk Hamer,part du principe que toute maladie trouverait sa cause dans un choc psychoaffectif enfoui, un « conflit », et qu’il suffirait de le ramener à sa mémoire pour qu’un patient en guérisse définitivement. Selon Claude Sabbah, qui a réussi à colporter la Biologie totale jusque dans une conférence à la Sorbonne, sa méthode serait le remède à toutes les
pathologies, y compris celles réputées incurables telles que le cancer ou le Sida.
Fervent opposant à la médecine conventionnelle, Claude Sabbah affirme que le simple diagnostic d’une maladie est à l’origine de son amplification, et, sans appeler directement les malades à cesser leurs traitements, il laisse entendre que les poursuivre serait contre-productif. Des déclarations qui ont valu à l’ancien médecin de se retrouver dans le radar de l’Undafi, mais aussi de la Miviludes, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.
Des centaines de disciples
Pourtant, après neuf ans d’instruction, Claude Sabbah n’est aujourd’hui convoqué devant le tribunal correctionnel que pour « publicité mensongère ». L’enquête a fait suite à la plainte d’une femme dont le mari, atteint d’un cancer de la prostate, était décédé après avoir abandonné tout traitement classique pour se conformer aux préceptes de la Biologie totale. « Aucun lien direct n’a pu être établi entre Claude Sabbah et le patient décédé », regrette Alain Caumont, président de l’Adfi Hérault-Lozère, une association membre de l’Unadfi.
Pour la justice, le fait que le mari de la plaignante se soit conformé aux théories de la Biologie totale relève néanmoins de la responsabilité de Claude Sabbah. C’est que l’ancien médecin a réussi à faire des émules. Au cours de
formations (grassement rémunérées) et à travers de nombreux supports (payants), Claude Sabbah a converti à sa
théorie de nombreux adeptes, y compris médecins, désormais prescripteurs de la méthode. On les retrouve à travers tous les pays francophones (Canada, Suisse, Belgique où un pseudo-thérapeute a été condamné) et particulièrement dans l’Hérault (Claude Sabbah est originaire de Villeneuve-lès-Maguelone). Des centaines, voire des milliers, de disciples de Claude Sabbah, susceptibles d’essaimer encore plus les « théories fumeuses » de la Biologie totale.
Un « désastre » que l’Advi, entre autres, compte bien réduire au maximum en médiatisant le procès de Claude Sabbah. A défaut d’une condamnation, les associations obtiendraient ainsi la vitrine nécessaire pour mettre en garde
les victimes potentielles de la Biologie totale.
Comble de l’ironie, la défense de Claude Sabbah pourrait demander aujourd’hui un report de l’audience en raison de l’état de santé de l’accusé. Mais peut-être le père de la Biologie totale n’a-t-il pas encore réglé tous ses conflits
source : l’herault du jour.fr