Mardi 12 décembre 2023
Les révélations récentes sur les très graves dérives du mouvement Misa, perpétrées depuis de nombreuses années, doivent alerter sur la réalité d’un phénomène international. Alors que le gouvernement a dévoilé, il y a une quinzaine de jours, sa stratégie nationale pour lutter contre les dérives sectaires, Catherine KATZ, ancienne magistrate, aujourd’hui présidente de l’Unadfi et Francis AUZEVILLE, lieutenant-colonel de gendarmerie à la retraite, président du CCMM-Centre Roger Ikor, enfoncent le clou et sont formels : juridiquement, il est temps de monter d’un cran et de permettre aux primo intervenants, aux enquêteurs et aux magistrats d’être plus efficaces pour rendre justice aux victimes.
Un ami avait cette formule très juste : « quand un gourou est cru, la victime est cuite ». Et les gourous sont encore trop souvent crus tandis que les victimes peinent à être crues. Et pourtant, elles sont de plus en plus nombreuses. Nous n’évoquons pas là la somme de faits divers mais bel et bien d’un sujet de société préoccupant. Les chiffres sont là : dans son dernier rapport, la Miviludes fait état d’une augmentation de 33 % des signalements en un an et d’un doublement depuis 2015.
Une fois que le diagnostic est posé, il faut trouver les moyens pour répondre. Autrement dit, renforcer l’arsenal juridique. Nos associations appelaient un texte de loi de leurs vœux, car c’est aujourd’hui le chaînon manquant.
Nos associations sont présentes sur le terrain aux cotés des victimes depuis plusieurs décennies. Si la Loi About-Picard a été une avancée majeure, il est nécessaire, aujourd’hui, de franchir un nouveau pas et nous nous félicitons du travail engagé avec la secrétaire d’État Sonia Backès, repris avec énergie par Mme la secrétaire d’État à la citoyenneté, Sabrina Agresti-Roubache qui lui a succédé.
Le projet de loi, tel qu’il nous a été présenté va dans le bon sens. La nouvelle stratégie nationale vise à mieux mobiliser les pouvoirs publics. Nous nous en félicitons dans l’intérêt des victimes.
Compte tenu de l’accélération du phénomène sectaire et de la gravité de certaines situations, tout ce qui peut concourir à renforcer l’arsenal législatif visant à protéger les personnes des dangers sectaires ne peut être qu’encouragé. Le projet de loi crée dans le code pénal un nouveau délit de placement ou de maintien en état de sujétion psychologique ou physique et ajoute une circonstance aggravante des infractions d’atteintes aux biens et aux personnes ; il prévoit aussi de sanctionner une provocation à l’abandon ou l’abstention de soins ou à l’adoption de pratiques exposant à un risque grave pour la santé par une perte de chance.
L’Unadfi et le CCMM souhaitent également que cette loi facilite leurs actions devant les juridictions. L’Unadfi les accompagne devant ces juridictions depuis 27 ans, du fait de sa reconnaissance d’utilité publique. Ces deux associations estiment que l’Unadfi doit pouvoir conserver l’entier périmètre de sa reconnaissance d’utilité publique, afin de poursuivre cette mission dans les meilleures conditions et être rejointe par les autres associations le souhaitant.
Les groupes sectaires sont nombreux, leurs lobbys puissants. Il est impératif que l’État et les deux assemblées tendent à rééquilibrer les forces en donnant notamment aux associations les moyens d’agir efficacement contre les agissements délictueux et criminels des mouvements sectaires.
Catherine KATZ
Présidente de l’Unadfi
Francis AUZEVILLE
Président du CCMM