Santé : l’homéopathie, à petites doses seulement !
Les Français adorent l’homéopathie. Près d’un tiers achètent plus ou moins régulièrement ces petits granules microdosés, comme Apis mellifica (contre les piqûres d’insectes), Arnica montana (pour traiter les courbatures), ou encore Chamomilla vulgaris (pour les douleurs… ou les grosses colères). Leurs motivations ? Ces produits sont perçus comme «naturels, donc meilleurs pour la santé» (59 %), ils permettent «d’éviter les médicaments chimiques» (54 %) et sont jugés «efficaces» (49 %), selon une enquête Ipsos. Cet engouement ne pose pas de problème… sauf s’il entraîne un renoncement aux vrais soins, notamment pour les maladies graves. Or c’est le cas. Plusieurs autorités de santé lancent un signal d’alarme. L’Académie des sciences européennes, qui compile toutes les études sur ce sujet et vient de rendre son verdict, estime l’homéopathie inoffensive au mieux, dangereuse au pire.
QUESTION DU JOUR. Médecine : croyez-vous aux vertus de l’homéopathie ?
Personnes fragiles, attention
Le Conseil national de l’ordre des médecins pointe «un certain nombre de dérives graves». Comme le cas que nous révélons, celui d’un homéopathe condamné à deux ans d’interdiction d’exercer car il soignait sa patiente cancéreuse… au radis noir. Même la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) s’intéresse à la question. «On constate qu’il existe des dérives dans le domaine des médecines naturelles, où des charlatans exercent toujours. Certains patients sont en état de faiblesse, et il leur arrive de tomber sur un homéopathe ou un naturopathe qui leur explique que le cancer, c’est purement psychologique, et qu’il vaut mieux prendre quelques granules plutôt qu’aller se faire faire une chimio», explique son président, Serge Blisko.
Au printemps dernier, l’Italie a été particulièrement choquée après le décès d’un garçon de 7 ans qui était soigné uniquement par homéopathie. L’enfant est mort des suites d’une otite non traitée, qui a provoqué une infection au cerveau. «Bien sûr que nous condamnons ces dérapages. C’est le contraire même de notre discipline, qui repose au contraire sur l’écoute attentive du patient», se défend le docteur Charles Bentz, président du Syndicat des médecins homéopathes.
Ces vaccins contre la grippe qui n’en sont pas
Peut-être avez-vous vu sur le comptoir de votre pharmacie un écriteau annonçant un «vaccin» antigrippe homéopathique. Les guillemets qui entourent le mot «vaccin» ont beau faire office de précaution, ils ne permettent pas de masquer la réalité : «Aucun médicament homéopathique ne peut être considéré comme un vaccin», tranche l’ordre des pharmaciens. Et pour cause : ils ne génèrent pas d’anticorps. Généraliste en Bretagne, Bénédicte Barbarin est elle aussi tombée sur l’une de ces affiches. Dessus, des granulés pour prévenir l’état grippal étaient présentés comme un vaccin.
Suis passée à la pharmacie chercher mon vaccin anti grippe. Sur tous les comptoirs y’a ça. null pic.twitter.com/rsNw4jwq3k
— farfadoc (@farfadoc) 7 octobre 2017
«Ça m’a agacée. Nous avons déjà assez de mal en cabinet pour rassurer sur cette question pour qu’il ne soit pas nécessaire d’en rajouter une couche avec des vaccins qui n’en sont pas ! Cela crée forcément la confusion.» La photo qu’elle a postée sur Twitter (à gauche) a suscité des dizaines de réactions. «C’est pour les personnes fragiles que cela m’inquiète, reprend-elle. Je ne voudrais pas qu’une personne âgée se pense immunisée avec des granules. Leur utilisation à la place du vrai vaccin antigrippal est une perte de chance pour les patients.»
En 2016, l’Agence du médicament (ANSM) avait déjà mis en garde sur ces pratiques. Et, alors que la campagne de vaccination antigrippe a commencé il y a deux semaines, l’ordre des pharmaciens est clair : « Les pharmaciens sont tenus de ne pas entretenir la confusion.»
Florence Méréo
http://www.leparisien.fr/societe/sante-l-homeopathie-a-petites-doses-seulement-21-10-2017-7346232.php