Voilà quelques jours, l’association Non à la drogue, oui à la vie ouvrait une antenne au Pays basque. Dès samedi dernier, ses bénévoles déployaient « un stand d’information » sur la place des Cinq cantons, à Bayonne. Ils remettront cela après-demain, au même endroit, annonce un communiqué de presse. Ce dernier ne manque pas d’interpeller par sa citation de « l’humaniste Ron Hubbard ». Soit l’auteur de science-fiction américain fondateur de l’Église de scientologie (en 1954), organisation classée en France parmi les sectes depuis un rapport parlementaire de 1995 (1).
Contacté hier, le président pour l’Aquitaine de Non à la drogue, oui à la vie affirme n’avoir « aucun lien » avec la scientologie. Samuel Bendhaiba balaie d’un laconique « rien à voir ». Pourquoi citer Hubbard dans sa communication ? « C’était la citation qui m’a inspiré pour ce communiqué, c’est tout. » Pourquoi ne pas chercher l’inspiration chez quelque professeur ou addictologue à la science moins soumise à caution ? « Moi, je fais une campagne de prévention. Je ne répondrai pas à d’autres questions », coupe le président.
Parrainage pourtant affiché
Par exemple, il ne commentera pas cette coïncidence étrange pour une association qui n’a « rien à voir » avec la scientologie : Non à la drogue, oui à la vie est précisément l’intitulé d’une campagne menée par l’« Église » à travers le monde. Quelques clics sur le site Internet de celle-ci permettent de le vérifier.
Vraiment « aucun lien » ? Samuel Bendhaiba persiste et signe : « Nous sommes une association qui a été créée en France, en 1991, par l’acteur Xavier Deluc. » Les références à la scientologie sur les plaquettes distribuées par Non à la drogue, oui à la vie seraient donc elles aussi fortuites. Pourtant, à moins de ne savoir lire, ces supports affichent sans ambiguïté la mention suivante : « Cette association est parrainée par l’Église de scientologie. »
Prosélytisme ?
Peut-on pour autant parler de prosélytisme en faveur d’une organisation rangée en France parmi les sectes ? En tout cas, la dernière page des fameuses brochures invite, « pour obtenir un exemplaire gratuit de ces livrets ou d’autres informations au sujet des découvertes de Ron Hubbard sur la drogue », à visiter le site de l’association mais aussi « l’Église ou Mission de scientologie de votre région ».
Dans les crédits et remerciements apparaît, certes en caractères très fins, la mention de la « marque déposée » Narconon. C’est une association liée à la scientologie (son fondateur se réclame de l’influence de Ron Hubbard). C’est aussi une méthode de désintoxication controversée, développée au sein de cette entité. Elle proscrit notamment les produits de substitution dans les phases de sevrages.
Si Non à la drogue, oui à la vie vient d’apparaître dans le Pays basque, elle est connue ailleurs, comme par exemple à Bordeaux. Dans la capitale régionale, des élus locaux et d’autres associations combattent ses « campagnes de prévention ». L’année dernière, certains ont même manifesté pour s’opposer à la distribution de tracts sur la place de la Victoire (notre photo).
Il est décidément bien difficile de croire les dénégations du président régional de l’association. Surtout quand l’Église de scientologie-Mission Bordeaux elle-même écrivait, l’été dernier, dans une réponse à notre journal, partager des « valeurs communes » et travailler « en collaboration avec l’association Non à la drogue, oui à la vie. »
(1) La réaction de l’Église de scientologie est systématique, à l’évocation du rapport parlementaire qui la classe parmi les sectes depuis 1995. Elle précise à chaque fois que ce texte n’a « aucune portée juridique » et rappelle que dans bien des pays, notamment les États-Unis, son berceau, elle est reconnue comme religion à part entière.
source :http://www.sudouest.fr/2012/05/31/ils-s-installent-ici-sous-l-egide-de-la-scientologie-729836-4018.php
SUD OUEST 31 mai 2012