Le Chesnay, petite ville cossue des Yvelines à 20 km du centre de Paris, est plutôt réputée pour sa tranquillité. Mais depuis quelques semaines, elle est l’objet d’une vive polémique, après l’annonce de la signature, par la mairie, d’un permis autorisant la construction d’un temple mormon au sud de la ville, premier du genre en France.
Sur le papier, l’édifice, installé à quelques encablures du parc du château de Versailles, sera de grande ampleur. Et nombreux sont ceux qui s’interrogent sur ce nouveau bâtiment du 46, boulevard saint Antoine, qui s’étendra sur 7 000 m2, au cœur d’un vaste terrain acheté pour 20 millions d’euros, et occupé depuis 40 ans par l’EDF.
Des opposants jusqu’au sein du conseil municipal
« Le maire a délivré le permis de construire en un temps record, moins de 80 jours, alors qu’il faut bien plus de temps en temps normal » , déplore Matthieu, 33 ans, représentant de l’association Avenir 46, dont les membres s’opposent fermement à cette installation et craignent une modification « en profondeur » de la ville.
Les remous n’épargnent pas non plus le conseil municipal, où un adjoint au maire a renoncé à son poste pour protester contre la décision du premier édile. « Nous avons besoin de logements sociaux et d’équipements sportifs. Le temple mormon ne correspond à aucun de ces besoins » , fustige aujourd’hui le démissionnaire, Louis-Marie Soleille (divers droite).
Quatre recours contre le projet
Averti en mai 2010 de l’intention de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, le nom officiel des mormons, d’acheter le terrain, le maire (UMP dissident) dit en avoir informé le conseil municipal un mois plus tard, averti l’Église catholique, et chargé trois élus de travailler sur la question. « Les mormons ne sont pas considérés comme une secte. Je n’avais aucune raison juridique de m’opposer à leur demande » , dit-il, même s’il ne cache pas son manque d’enthousiasme.
« Les Chesnaysiens ne sont pas favorables aux mormons, concède-t-il, mais ils sont plus heureux que si un projet d’urbanisme leur avait imposé 17 000 m2 – la surface constructible maximale – de logements sociaux ou de bureaux. »
À ses opposants, qui lui reprochent de ne pas avoir préempté le terrain, Philippe Brillault oppose qu’un tel projet n’était ni réaliste, ni responsable. Et que dans ce cas, il aurait été obligé d’y construire exclusivement des logements sociaux, des équipements publics, ou aménager un espace vert. « Faux , répliquent ses détracteurs, un projet mixte était parfaitement possible. » Quatre recours pour annuler la décision du maire ont été déposés.
Une polémique d’origine plus politique que religieuse
Le porte-parole du mouvement mormon se veut rassurant. Il souligne que ce temple ne sera ouvert que du mardi au samedi. Les rassemblements dominicaux seront toujours organisés dans les deux lieux de culte installés dans les Yvelines, à Versailles et à Mantes.
« L’installation de ce temple ne changera rien à la situation de la ville » , promet Dominique Calmels, responsable de la communication de la branche française. « Ce ne sera pas un lieu de rassemblement. Les cérémonies qui y seront célébrées réuniront 80 personnes au maximum » , poursuit-il.
Sur le fond, la polémique a donc pris un tour beaucoup plus politique que religieux. « Le malaise n’est pas religieux ou spirituel. Au nom de l’Évangile, nous accueillons tout le monde. Je ne vois pas pourquoi je dénoncerai des gens parce qu’ils n’ont pas la même foi que moi » , affirme le vicaire de la paroisse, le P. Paul Amar.
Informer les habitants sur les mormons
L’évêque du lieu, Mgr Éric Aumônier, s’interroge : « Je cherche encore l’intérêt de cette implantation dans une ville qui, à ma connaissance, ne compte pas actuellement de mormons. » S’il dit comprendre le malaise exprimé par certains catholiques, il souligne qu’il ne lui revient pas de s’opposer à l’installation de ce temple : « Qui peut penser que l’Église catholique pourrait ou voudrait bâillonner des groupes religieux en les empêchant de s’implanter ? »
Le diocèse de Versailles a prévu, dans les jours à venir, d’éditer un tract à plusieurs milliers d’exemplaires pour informer les habitants de la région sur les mormons, rappelant qu’aux yeux de l’Église, les adeptes de ce courant ne sont pas chrétiens, mais qu’ils ne peuvent pas non plus être considérés comme appartenant à une secte.
source : http://www.la-croix.com/Religion/S-informer/Actualite/L-installation-d-un-temple-mormon-en-banlieue-parisienne-fait-debat-_NP_-2012-01-04-754048
LA CROIX 5 janvier 2012
par
LOUP BESMOND DE SENNEVILLE