{{Le procès de l’ « Association spirituelle de l’Eglise de scientologie » pour « escroquerie en bande organisée »}}, s’est ouvert cet après midi au tribunal correctionnel de Paris. Premier accusé, et cela en tant que personne morale, le principal centre parisien de cette secte qui figure sur la liste établie en 1995 par le rapport de la commission parlementaire chargée d’enquêter sur le phénomène sectaire. Mais sept de ses adeptes sont aussi jugés, dont certains pour « exercice illégal de la pharmacie ». Seuls deux des quatre personnes à l’origine de la plainte, et qui s’étaient vues délester de 15 245 à 114 336 euros, se sont constituées parties civiles. Ces sommes assez considérables ont été dépensées en auditions « dianétiques » sensées aider à reprendre confiance en soi, en stages de purification basés sur des cures de sauna et sur la prise de vitamines et de sels minéraux, en interrogatoires à l’électromètre, un appareil qui détecterait les zones d’angoisses dans le corps, ou encore en achats du fameux éléctromètre et de toute une littérature scientologue aussi absconde qu’hors de prix.

{{Pour éviter les procès}} – celui-ci est le cinquième en France depuis 1996 – l’Eglise de scientologie rembourse désormais les adeptes devenus par trop récalcitrants. Ce fut le cas pour deux personnes dont les dossiers ont été joints, à ceux des plaignants, au procès qui se déroule à partir d’aujourd’hui et durant quatre semaines. Satisfaits d’être à peu près rentrés dans leurs frais, ces anciens disciples ont retiré leur plainte. Mais les méthodes qu’emploierait la secte pour soutirer de l’argent à ses adeptes et même quand ces derniers ont dû contracter des emprunts pour s’acquitter de leur dette, soit, la manipulation mentale, le harcèlement, l’intimidation et même les menaces, seront au cœur des débats.

{{Aujourd’hui président de la Miviludes}} ou « Mission internationale de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires », le magistrat Georges Fenech a instruit le dossier du procès qui, en 1997, avait abouti à la condamnation en appel à des peines de prison avec sursis de quatre scientologues exerçant à Lyon. Le directeur local du centre ayant de son côté écopé de 3 ans de prison dont 18 mois de sursis, assortis d’une amende de 500 000 francs (70 000 euros), à la suite du suicide d’un adepte. Un an auparavant, en 1996, Georges Fenech nous avait parlé des pressions que l’Eglise de scientologie lui avait fait subir au cours de l’instruction de cette affaire : « Ca tombait de tous les côtés. J’ai fait l’objet d’une trentaine de plaintes pour violation du secret de l’instruction ainsi que d’une requête en suspicion légitime. En Suisse, j’ai dû répondre à deux procès. J’ai même été filé par des anciens de la cellule de l’Elysée. Quand je racontais mes malheurs à mon entourage, on se moquait de moi. Mes amis me disaient : « Tu te crois dans un roman de science- fiction » !

{{Cette secte qui est l’une des plus puissantes et des plus riches de la planète, et qui revendique 8 millions de membres}}, sait en effet trouver les moyens pour protéger ses avoirs. Son fondateur en 1954, Ron Hubbard, n’avait-il pas coutume de dire à ses disciples : « Ne vous défendez jamais. Attaquez !» ? Et cela commence fort puisque Me Patrick Maisonneuve, avocat de la scientologie dans le procès qui débute à Paris, conteste l’ensemble des accusations portées contre la très rentable organisation et 7 de ses adeptes.

{{Nous avons posé quatre questions à propos de ce procès à Georges Fenech, président de la Miviludes, et de ce fait contraint à une réserve qui frise de près la langue de bois.}}

{{Le Nouvel observateur. – Quels sont les enjeux ce procès ?}}

{{Georges Fenech.}} – Douze ans après celui de Lyon, qui avait très clairement condamné les méthodes de la Scientologie, la justice parisienne va de nouveau porter un jugement sur les moyens employés par cette organisation. A la différence que, cette fois, l’Association spirituelle de l’Eglise de scientologie est poursuivie en tant que personne morale. Nous espérons que les débats pourront éclairer l’opinion publique et la justice sur le fonctionnement réel de cette organisation.

{{NO. – Celle-ci encourre t-elle le risque d’être dissoute ?}}

{{G. Fenech.}} – La Miviludes n’a aucun avis à donner sur son éventuelle dissolution. Mais, dans le cas où la responsabilité de la personne morale est établie concernant les faits qui lui sont reprochés et qu’une condamnation est prononcée, le tribunal de Paris peut tout à fait prononcer la dissolution de cette association.

{{NO. – Comment procède celle-ci pour dépouiller ceux qu’elle recrute?}}

{{G.Fenech.}} – Au départ, la quasi-totalité des membres de l’Eglise de scientologie est contactée par une offre pour un test de personnalité qui révèle systématiquement des défaillances d’ordre personnelle ou psychologique. Avec des motivations très lucratives, l’Eglise de scientologie propose alors toute une série de cours, de séminaires, d’auditions, ainsi que l’achat d’un électromètre vendu 5000 euros alors que les experts ont estimé son coût à moins de 500 euros. Ensuite, c’est l’engrenage…

{{NO. – Dans d’autres pays d’Europe, telle par exemple l’Allemagne, cette secte a été placée sous haute surveillance. Bénéfice t-elle de protections en France ?}}

{{G. Fenech.}} – En premier lieu, la Miviludes ne qualifie pas l’Eglise de scientologie de secte. Nous ne menons pas un combat contre cette organisation mais nous nous devons de rester vigilants en regard de ses éventuelles dérives sectaires. Pour ce qui est des protections dont cette organisation pourrait faire l’objet, à quelque niveau que ce soit, rien ne permet de l’affirmer.

(Propos recueillis par Sylvie Véran)

http://chroniquesjudiciaires.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/05/25/proces-une-bande-d-escrocs-les-scientologues.html