TOULOUSE, 9 jan 2007 (AFP) – Lucien Engelmajer, fondateur du Patriarche, une association d’aide aux toxicomanes mise en cause pour ses méthodes sectaires et des détournements de fonds, a été condamné mardi à cinq ans de prison et 375.000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Toulouse.
Jean-Paul Séguéla, ex-conseiller du ministère de l’Intérieur pour les questions de toxicomanie de 1993 à 1995, poursuivi pour avoir profité des largesses du Patriarche et reconnu coupable de trafic d’influence, a pour sa part écopé de trois ans de prison, dont un avec sursis et 50.000 euros
d’amende.
Des peines de cinq ans de prison avaient été requises contre Lucien Engelmajer, 85 ans, en fuite au Belize (Amérique centrale), et Jean-Paul Seguela, lors du procès, en novembre dernier.
Parmi les 17 prévenus, poursuivis notamment pour abus de faiblesse, abus de biens sociaux et abus de confiance, figuraient sept enfants de Lucien Engelmajer. Quatre d’entre eux ont été relaxés mardi, les trois autres étant condamnés à des peines allant de 18 mois avec sursis à 36 mois de prison, dont
30 avec sursis.
Les autres prévenus ont été condamnés à des peines allant de trois ans à 18 mois, généralement assortis d’un sursis, hormis l’un d’eux, qui a été relaxé.
Selon le procureur Yves Delperié, l’association Le Patriarche, créé en France au début des années 1970 et qui fut dans les années 1980-90 la principale structure d’accueil des toxicomanes, s’est révélée être "une secte qui a exploité sans vergogne" ses pensionnaires "pour construire un empire colossal", avec des ramifications dans de nombreux pays d’Europe et des Amériques.
Selon des témoignages de parties civiles, les toxicomanes étaient traités par un sevrage brutal, parfois isolés de l’extérieur, et contraints à un travail forcé censé les réinsérer, mais qui généralement n’était ni déclaré ni payé.
Le "Patriarche" a recueilli pendant des années des dons dans toute l’Europe au profit des toxicomanes et des fonds provenant de sociétés commerciales qu’il avait créées. Une part importante de ces sommes a été détournée et placée sur des comptes bancaires en Suisse et au Luxembourg, au profit de Lucien Engelmajer, de ses enfants et de plusieurs collaborateurs de l’association.
Le défenseur des enfants Engelmajer, Me Simon Cohen, qui avait plaidé la relaxe, a estimé que "le tribunal a rendu une décision éclairée", voire "juste et équitable" pour ceux qui ont été relaxés.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt international, le fondateur du Patriarche a également été condamné, de même que plusieurs prévenus, à verser des dommages et intérêts à une quinzaine d’ex-toxicomanes, parties civiles.
Lucien Engelmajer, absent au procès où il a été constamment qualifié de "gourou" et de "manipulateur" hors du commun, est sous le coup d’une autre procédure judiciaire pour viols et agressions sexuelles sur mineures, dans l’entourage de l’association.