Les lycées hors contrat dénoncent une inégalité de traitement.
Leurs élèves doivent passer l’intégralité des épreuves du bac en contrôle terminal.
Après une forte mobilisation en 2021, les lycées hors contrat avaient obtenu que leurs élèves ne passent pas la totalité des épreuves du bac en présentiel en pleine pandémie de Covid-19.
Mais en 2022, le ministère de l’Éducation nationale a rétabli un traitement différencié pour ces établissements.
Contrairement aux lycées publics et privés sous contrat qui passent 60% des épreuves du bac au contrôle continu, les terminales du hors contrat devront passer l’intégralité des épreuves à la fin de l’année scolaire.
Ces mesures concernent les quelque 4000 jeunes de terminale scolarisés dans des lycées hors contrats.
Ces établissements privés ne perçoivent aucune subvention de l’État, et disposent d’une plus grande liberté pédagogique.
Pour Anne Coffinier, cette inégalité de traitement révèle « une approche crispée de la part du gouvernement à l’égard du hors contrat ».
La présidente de l’association Créer son école, dénonce des contradictions dans l’approche du gouvernement : « Ce qui est paradoxal c’est que l’on fait confiance aux bulletins de notes des établissements hors contrat pour Parcoursup mais pas pour le bac. »
Pour Hervé Rolland, président de la Fondation pour l’école, le problème est avant tout philosophique. « Le bac est un examen national et cela exige l’équité. Il y a une erreur de démocratie », dénonce-t-il.
Les partisans de l’école libre dénoncent les conditions de passage de l’examen.
Les lycées hors contrat passent les 40% d’épreuves du bac qui demeurent au contrôle terminal en même temps que leurs homologues du privé et du public. À l’issue de cette première session d’examen ils n’ont que 10 jours pour passer les 60% restant en seulement quatre jours. Pour Anne Coffinier, des délais aussi courts sont « une injustice, une source de stress supplémentaire, dans un contexte déjà tendu à cause du Covid ».
L’évaluation de l’Enseignement moral et civique (EMC), pose aussi problème.
L’épreuve en effet, est jugée disproportionnée au regard du poids de la matière dans les programmes de terminale. « L’EMC est une matière à coefficient 1. Nous y consacrons une demi-heure par semaine mais la matière est évaluée par un oral de 30 minutes », explique Michel Valadier, directeur du lycée hors contrat Saint Dominique au Pecq (Yvelines). « En comparaison, la LV2, coefficient 5, à laquelle nous consacrons 2h30 par semaine est évaluée par un oral de 10 minutes », dénonce le chef d’établissement.
Une « suspicion permanente »
Le contrôle des lycées hors contrat est notamment justifié par une volonté de lutter contre le communautarisme islamiste.
« On comprend que le but est de bien vérifier que les lycéens n’aient pas des idées contrevenant aux valeurs de la République », confie Anne Coffinier. Pour Hervé Rolland, cette suspicion n’a pas lieu d’être.
« Je rappelle que la majorité des écoles hors contrat ne sont pas confessionnelles. On y retrouve 12% d’écoles catholiques, 3% d’écoles protestantes et 3% d’écoles musulmanes », affirme-t-il.
« Je crois qu’il y a souvent une confusion entre les écoles hors contrat et les écoles clandestines », affirme le directeur de la fondation pour l’école.
Pour lui, les situations de ces établissements ne sont pas comparables : « Les établissements hors contrats sont régulièrement inspectés et contrôlés et c’est une bonne chose. »
Le hors contrat regroupe une large diversité d’établissements, ce qui complexifie leur représentation. « Il y a des écoles très pauvres, d’autres très riches, des écoles à l’ancienne, d’autres ultra-innovantes, des écoles régionalistes, bilingues, pour les élèves handicapés, harcelés, etc. »
« La crédibilité de l’enseignement hors contrat en sort renforcée aux yeux des parents et de l’enseignement supérieur » Michel Valadier Directeur du Lycée Saint-Dominique au Pecq (Yvelines)
Michel Valadier déplore lui aussi un traitement discriminatoire.
Pourtant, les directeurs du lycée Saint-Dominique ne peuvent s’empêcher de constater que le maintien des épreuves à la fin de l’année renforce in fine la crédibilité de son établissement.
« Dans les autres lycées 70% des épreuves sont passées au contrôle continu.
Pour Parcoursup, on ne prend en compte que le premier et le deuxième trimestre, par conséquent, les élèves des lycées classiques n’ont pratiquement plus besoin de travailler au troisième trimestre. » explique le chef d’établissement.
« Nos élèves sont obligés de continuer à travailler jusqu’au mois de juin dans toutes les matières. » affirme Michel Valadier avant de conclure : « Finalement cette injustice se retourne donc contre ses commanditaires. La crédibilité de l’enseignement hors contrat en sort renforcée aux yeux des parents et de l’enseignement supérieur. »
source : Par Paul-Henri Wallet • Publié le 28/03/2022 Le Figaro Etudiant